Ah, le poids des années… Une expression bien connue, mais qui semble prendre tout son sens avec le temps. En avançant en âge, de nombreuses personnes remarquent une tendance à stocker plus facilement au niveau du ventre, que ce soit chez les femmes ou chez les hommes. Une observation courante… et désormais confirmée par la science.
Dans une étude récente publiée dans la revue Science (avril 2024), des chercheurs ont mis en lumière un mécanisme cellulaire bien particulier, impliqué dans l’accumulation de graisse abdominale au fil des années. Une découverte qui ouvre de nouvelles pistes pour mieux comprendre ce phénomène naturel, et peut-être un jour, mieux le réguler.
Un métabolisme qui ralentit… et un tissu adipeux qui se développe
À partir de la cinquantaine, notre corps subit plusieurs transformations. Parmi elles : une diminution progressive de la masse musculaire, qui entraîne une baisse du métabolisme de base. Résultat : l’organisme consomme moins d’énergie au repos, et a donc plus de mal à brûler les calories excédentaires. Celles-ci sont alors plus facilement stockées… notamment au niveau abdominal.
Ce stockage est lié au développement du tissu adipeux, et plus précisément du tissu adipeux blanc (TAB). C’est ce dernier que les chercheurs ont étudié de près.
Une population de cellules en pleine effervescence
Les scientifiques ont concentré leurs travaux sur les cellules progénitrices des adipocytes (CPA), un type de cellules souches capables d’évoluer en cellules graisseuses. Ils ont mené une série d’expériences fascinantes, notamment en transplantant des CPA de jeunes et de vieilles souris dans un second groupe de souris jeunes.
Le résultat est sans appel : les CPA issues de souris âgées ont produit une quantité massive de nouvelles cellules adipeuses. À l’inverse, les cellules souches de souris jeunes, même placées dans un environnement âgé, restaient peu actives.
Autrement dit, le potentiel de multiplication des CPA augmente avec l’âge, quelle que soit la jeunesse de leur “hôte”. Un renversement surprenant, puisque la plupart des cellules souches perdent en capacité de régénération avec les années. Pas les CPA.
Une nouvelle forme de cellules liées à l’âge
En poursuivant leurs recherches, les scientifiques ont découvert que le vieillissement transforme les CPA en un nouveau type de cellules : les CP-A, ou “pré-adipocytes engagés spécifiques à l’âge”. Ces cellules, qui apparaissent autour de la cinquantaine, se mettent à produire activement de nouvelles cellules graisseuses, en particulier autour du ventre.
Ce processus est régulé par une voie de signalisation précise : le récepteur du facteur inhibiteur de la leucémie (LIFR). Chez les jeunes souris, cette voie ne semble pas indispensable pour produire de la graisse. Mais chez les plus âgées, elle devient essentielle.
Une activation spécifique à l’âge… également chez l’humain
Pour valider leurs résultats, les chercheurs ont poursuivi leur travail en laboratoire sur des tissus humains. Grâce au séquençage d’ARN monocellulaire, ils ont analysé les cellules progénitrices adipeuses de personnes d’âges différents. Là encore, ils ont identifié une augmentation des cellules CP-A chez les sujets d’âge moyen.
Ces découvertes soulignent à quel point le corps est finement orchestré… et combien le processus de stockage de graisse abdominale est lié à des mécanismes profonds, déclenchés par le vieillissement naturel.
Que retenir de tout cela ?
Derrière la prise de poids abdominale liée à l’âge se cachent des transformations cellulaires bien spécifiques. Ce n’est donc pas simplement une question de “mauvaise hygiène de vie” ou de “manque de volonté” — des jugements souvent injustes. Le corps suit une logique biologique, dans laquelle certaines cellules deviennent plus actives avec le temps, et favorisent le stockage de graisse.
Mais cela ne signifie pas pour autant que l’on est impuissant.
Comme le rappelle le Dr Poonam Desai, médecin urgentiste, maintenir une activité physique régulière reste un levier essentiel pour soutenir le métabolisme. Elle recommande notamment les sports doux comme le yoga ou le Pilates, qui favorisent la masse musculaire sans brusquer le corps.
Côté alimentation, éliminer les produits ultra-transformés est un choix bénéfique à tout âge. Véronique Liesse, diététicienne, souligne d’ailleurs l’importance de cuisiner soi-même autant que possible, et de rester vigilant face aux messages marketing parfois trompeurs.
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